au moment où cette photo a été capturée, j’avais encore l’âge de croire qu’un lutin qui s’appelait benjamin habitait mon poignet et qu’il pouvait être tenu responsable des bêtises que je racontais ; j’avais encore l’âge pour faire des cœurs avec mes doigts (je n’ai jamais arrêté, en réalité) ; j’avais encore l’âge d’avoir cinq amoureux à la fois et de ne pas culpabiliser de ressentir tout ça ; j’avais encore l’âge de pleurer seulement parce que ça n’allait pas comme je le voulais ; j’avais encore l’âge de me blottir entre les bras de papa et de réclamer d’éternelles étreintes ; j’avais l’âge d’accepter la rondelle de charcuterie qu’on me tendait à la boucherie ; j’avais l’âge où je partais en courant dans les champs, les larmes roulant sur mes joues parce que déjà à cet âge j’avais l’âge de ne pas être comprise. j’avais l’âge de ne pas avoir l’âge, j’avais l’âge de ne plus avoir l’âge. j’avais l’âge où les certitudes commencent doucement de voler en éclats, où les disputes des parents semblent s’éterniser et les relations avec ses sœurs commencent de faire mal. j’avais l’âge où c’est devenu moins facile de sourire tout le temps, et j’avais l’âge où j’ai décidé de continuer d’essayer.
aujourd’hui j’ai l’âge où je m’exhorte à conserver cette partie de moi qui n’abandonne jamais, ce souffle qui me porte et m’emmène dans un monde imaginaire, cette force qui m’a guidée jusqu’ici. aujourd’hui je suis une personne globalement heureuse et je me le dois à moi-même et j’en suis tellement fière.aujourd’hui j’ai le même âge que j’ai toujours eu, me semble-t-il
- ce texte date du 4 avril 2019